Formateur, Consultant, Psychopédagogue, fonctionnant en libéral dans le cabinet d’ingénierie IPSE, je supervise depuis une quinzaine d’années, différentes équipes du champ sanitaire, social et de la formation ou de l’enseignement dans le Nord PAS DE CALAIS, mais aussi à Dijon, à Creil, à Anthony.
Ce travail est construit sur l’expérience de 20 équipes : il s’agit essentiellement des équipes du secteur de l’éducation spécialisée, mais nous avons aussi travaillé avec des lycées, des centres de formation, et des équipes municipales. En accompagnant ces équipes, notre rôle est de créer des schémas de représentations où la créativité facilite le réaménagement des pratiques. Ce travail de réaménagement, élaboré en co-construction par le groupe, à partir des témoignages de chaque membre impliqué par ses propres déterminations temporelles et spatiales, par son expérience, par ses imprégnations théorico cliniques, porte essentiellement sur le processus de liaison et de déliaison avec le PE (projet d’établissement). Le projet fait figure de référentiel, le vécu personnel avec ses interférences sur la pratique professionnelle étant un indicateur. Les situations exposées acquièrent ainsi le statut de vignette clinique. Il s’agit de créer un espace intermédiaire d’étayage. « Cet espace intermédiaire d’étayage sur le groupe est à la fois une instance de communication et une instance de conflictualisation : il ne s’agit pas seulement de prendre connaissance des points de vue divergents, sinon contradictoires, de chacun à partir d’un référent commun, mais grâce à ce positionnement de s’engager dans un remaniement progressif de ces positions pour opérer une démarche de conflictualisation, d’intégration des objections et des arguments et ainsi d’accéder à un nouveau rapport au savoir. » Le lieu de création de ce nouveau savoir est le lieu d’articulation des différences pour une appropriation de référents théorico cliniques communs, lieu qui doit se vivre comme un sas de circulation des paroles inédites par le simple fait que leur verbalisation est rendue possible par notre accompagnement. Mais au-delà de toute considération clinique, la supervision a des effets formatifs.
Je présente aujourd’hui ce que j’appelle la construction ou l’instauration d’un système auto poïétique dans le cadre de supervision collective d’équipe.
Ici j’aborde la question de la supervision d’équipes éducatives, soignantes et enseignantes menée en tant qu’intervenant extérieur, et mandaté par la structure pour animer ces séances de travail qui consiste à optimiser les atouts de l’équipe. En choisissant de parler d’autopoïèse, j’ai choisi de mettre l’accent non seulement sur les acteurs (ceux qui, au quotidien, agissent pour permettre au sujet d’advenir) mais aussi et surtout sur les auteurs (ceux qui produisent des assertions). En effet, le superviseur ne connait le public et l’organisation institutionnelle autrement que par ce qu’en disent les participants. Et c’est ce dire qui constitue le matériau L’objet premier du travail est de permettre l’optimisation par le groupe de compétences professionnelles de chacun dans une habilitation intersubjective au sens où le propose Nicole Roelens. « L’acte symbolique de nomination des compétences d’une personne lui assure un territoire symbolique et sociotechnique où ses assertions sont prises au sérieux et où elle a le droit d’agir » (Roelens, 1998, p. 124). Étant entendu que « Les compétences de chacun sont coproduites dans les interactions symboliques des rôles et places » N.Roelens 1999, p. 123. Tout le travail de supervision consiste d’abord à nommer les compétences du Sujet
J’aborde ici quatre des axes que je privilégie dans la supervision d’équipe :
1. L’énonciation : les matériaux prélevés par des participants toujours à la recherche de technicité ou d’outils pour une construction de solution.
2. Le travail sur la demande : ce qu’il en est de l’appropriation de la commande institutionnelle par les participants
3. L’ancrage des ressources et compétences dans une recherche de sens
4. La circularité des mandats, des fonctions, la production du trans, de la polyphonie ou du multilinguisme.
1) L’énonciation en supervision
On peut postuler d’emblée qu’il existe des résonances et des isomorphismes dans le système qui s’instaure dans la supervision. Il y a une adéquation particulière entre superviseur et équipe supervisée, entre l’équipe supervisée et le public qu’il s’agit de tenter d’utiliser pour témoigner d’une compétence qui peu à peu apparaît à l’occasion d’une verbalisation ou d’une mise en mot. « L’expérience de chacun, professionnelle et personnelle, les événements heureux ou malheureux, n’adviennent au monde pour constituer un savoir, que forgés et trempés au feu de la parole et du langage » (Rouzel, 1997, p. 11).
Ceci implique de se focaliser sur tous les éléments permettant aux professionnels d’énoncer ou de nommer leurs compétences, qu’elles soient énoncées comme telles ou non. « On ne s’approprie jamais l’expérience des autres, leur vécu. On ne connaît que les réponses qu’ils veulent bien donner même si on y trouve des réponses cachées à eux-mêmes. Chacun a tout un savoir connu de lui, éphémère, non dicible, non transmis » (Beillerot, 1989, p. 190).
Ainsi il s’agit de transformer les difficultés évoquées par les « supervisés » dans leur relation avec le public accueilli en information pertinente, leur permettant de mieux s’orienter dans leur pratique. Nous sommes en quelque sorte dans une opération à double mécanisme. Tout cet semble s’inscrire comme un système à double opération. D’abord une division-soustraction : les informations sont alors anecdotiques, fragmentaires parfois morcelées créant une communication à allure divisionnalisée où les membres du groupe risquent la plus part du temps d’être dans une pluridisciplinarité. Il y a ensuite une multiplication-addition : les informations pertinentes transdisciplinaires transversales sont plus de l’ordre du théorico-clinique où les membres du groupe sont la plus part du temps dans une harmonisation du discours et non dans une homogénéité Ce partage est réalisée par l’échange entre les participants avec le superviseur et entre eux. Ici ça tient par la circularité de la parole. Le superviseur est donc un passeur, un facilitateur. C’est à lui de faire passer du pluridisciplinaire au transdisciplinaire.
Dans une approche systémique par exemple, dans la mise en évidence de la compétence des familles, ce qui est confortable pour le thérapeute, c’est non seulement le fait de contribuer à l’exercice de ces compétences mais et surtout qu’il n’a fait que les faire advenir en restituant à chaque membre de la famille une parole personnelle. La supervision pour moi se réalise dans cette configuration qui consiste à laisser advenir chez chaque participant ses propres dimensions.
Le passage de l’énonciation des problèmes à celui de l’énoncée de ce qui se vit effectivement va permettre l’auto structuration des solutions. Ainsi du pourquoi les problèmes, on revient au comment des faits vécu : on évoque, on met en mot, on décrit le contexte, avant d’envisager le comment des solutions. Les solutions émergent dans les interstices, dans les intervisions au travers de la diversité des hypothèses émises par les participants. Nous sommes là dans un double renversement épistémologique par rapport au schéma classique de causalité linéaire. Nous initions une causalité circulaire. Nous parlerons alors de boucle de rétroaction.
En supervision, si j’ai choisi de privilégier mon regard sur l’interlocution pour laisser advenir les solutions c’est par ce que je parts du présupposée que chaque membre du groupe a à l’égard de l’autre une écoute empathique préalable des problèmes. Chaque participant est capable de proximité et de distance à la fois. Repliement réflexif et dépliement narratif nourrissent ainsi une psychopédagogie de l’acte.
Le modèle interactionniste centré sur les énoncées est un processus phénoménologique et interactionnel de signification, qui consiste à aider l’interlocuteur à énoncer avec des mots nouveaux ce qui s’est vécu. Cette reformulation me semble particulièrement importante, tenant compte du fait qu’une polyphonie est à l’œuvre dans ce travail de partage. «La culture d’un groupe n’est autre que l’inventaire de tous les modèles de comportement ouvertement manifestés par tout ou partie de ses membres. Le lieu de ces processus, dont la somme constitue la culture, n’est pas la communauté théorique qu’on appelle la société, ce sont les interactions individuelles, et sur le plan subjectif, l’univers de significations que chacun peut se construire à la faveur de ses relations à autrui» (Sapir, 1967, p. 94).
Partant du postulat de Pineau(1988) qui indique que « la prise de conscience par le plus grand nombre que nous sommes en interaction, que nous apprenons en interaction peut permettre à chacun de découvrir dans sa propre vie, dans ses histoires d’apprentissage, s’il se met en perspective tant du long terme que d’une société globale, qu’il a à devenir plus solidaire, qu’il a intérêt à l’enrichissement intellectuel de l’autre, qu’il a intérêt à l’intégrité de l’autre dans ses pouvoirs, apprendre, réfléchir, agir ».
Dans mes interventions en supervision je parle toujours de cercle vertueux du projet qui doit viser d’une part à faciliter la perception de chacun et d’autre part à en construire d’autres avec le groupe dans l’ici et maintenant de la séance. Il s’agit ainsi d’activer le processus groupal par circularisassions de l’information échangée. Dans l’Anthropologie du projet J.P. Boutinet « tente une psychosociologie des conduites d’anticipation opératoires », qui selon lui nous conduit à nous interroger sur la façon dont les individus, groupes, cultures vivent leur rapport au temps, leur rapport à la résolution des problèmes. Le projet est alors défini comme une « anticipation opératoire individuelle ou collective d’un futur désiré ». La notion de projet renvoie en effet à la capacité de créer et au désir primitif de transformation / appropriation : il y a un ordre à évincer, et un ordre à faire advenir. Ce qui s’élabore dans le projet devient la résultante de ce qui se métabolise en supervision.
Pour aller plus loin, J.P. Boutinet nous rappelle les fondements philosophiques du concept de projet : le projet apparaît toujours comme une interaction entre un sujet et un objet. Le projet est alors le résultat d’une action réciproque entre le Moi et quelque chose d’extérieur à celui-ci. (Présentation moi/non-moi de Fichte, reprise par les psychologues contemporains : interaction individu-milieu, postulat de base de toute la psychologie contemporaine).
La supervision examine les dérives du projet, le rôle de l’échec dans le projet y prend figure comme médiation pour introduire la temporalité chère à Gaston Pineau notamment dans l’ouverture « des entre-temps d’où peut jaillir une temporalité personnelle, une histoire, une chrono génie ». Par la médiation verbale de l’énoncée où la transitionalité interne ou psychique se met en œuvre, la supervision crée des zones de double communication : se démarquer et s’articuler. Ce qui importe dans la supervision, c’est la prise de parole par une double opération de repliement réflexif et de dépliement narratif. La supervision démontre en fine la nécessité d’une méthodologie de projet… J.P. Boutinet mène une réflexion globale qui incite à lever la « tête du guidon ». Ce qui, selon lui, est d’ailleurs le rôle d’un « conseiller analyste extérieur » (que l’on appelle plus couramment coach ou consultant, superviseur), qui doit avoir pour mission :
– d’aider le ou les acteurs à mieux déchiffrer la situation dans laquelle ils sont insérés, afin de dégager des possibilités d’action
– d’aider les acteurs à expliciter leurs motivations ou leur absence de motivation
– de dégager d’éventuels objets préférentiels à investir, à la lumière du travail précédent
Pour conclure, l’auteur détermine les quatre propriétés du projet
Si l’on suit ce modèle de Boutinet la supervision est un inédit vital lorsqu’elle engage les participants dans une bio scopie, c’est-à-dire dans l’historisation des événements et l’historisation du projet. L’inédit vital renvoie à ce qui s’énonce dans les récits de vie.Je travaille le concept de transaction vitale comme indicateur de formation personnelle. Il me semble en effet que toute transaction, à travers et par delà l’action, performe, c’est-à-dire crée une forme en produisant une relation entre-deux éléments. La formation produite par transaction est donc plus ou moins formant ou déformante, autoformanteou hétéroformante. Déterminer la nature de la formation produite n’est donc pas évident et exige des conditions d’analyse spécifiques. Si les transactions peuvent être vécues comme indicateur global de formation par leurs facettes sociales observables, actions entre les acteurs, leur interprétation n’est pas obvie. Elle est liée aussi à leurs facettes internes, interactorielles, au sens que leur donnent les autres. Et ce sens n’est accessible que parce qu’ils en disent, sans l’exclure non plus. (Pineau, 1998, p. 69)Cette recherche qui s’attache à considérer les informations pertinentes devient alors un antidote de la répétition et de la mort. Chaque fois qu’un sujet se raconte les faits rapportés ne sont pas une répétition. L’émotion qui peut s’y dégager constitue toujours une expérience nouvelle. Les mots pour le dire sont constitutifs d’une réécriture de soi dans une perspective double: une résilience et une reliance. « Les adultes en formation – dont j’espère faire partie – ne cherchent pas à faire leur histoire pour faire de la littérature et encore moins du disciplinaire. Ils essaient de faire leur histoire pour tenter de survivre, c’est-à-dire d’abord de gagner leur vie, de la faire ou de la refaire et de la comprendre un peu » (Pineau, 1996, p. 66). C’est en quelque sorte une transaction vitale (transaction de soi à soi). «
Chaque séance initie une figure de style en interrogeant la pratique de chacun dans une chaine signifiante. L’anticipation méthodologique (c’est le temps de la praxéologie) s’opère ici. L’autobiographie raisonnée, au sens développé par Desroche est l’une de ces anticipations. Les tranches de vie rapportées ça et là sont mises en cohérence. Le désir de s’affranchir d’une multitude de blocages est exposé à la fois comme un lieu de restitution des paroles personnelles où les actants se coalisent pour laisser échapper les ressources mobilisables et mobilisées du sujet, et comme un lieu où l’on pose une plainte pour les souffrances endurées à la manière d’un plaignant auprès d’un juge. Pour paraphraser Dubar et Demazière (1997, p. 63), on peut dire que « la construction langagière » d’une réalité est « au cœur d’une recherche centrée sur les interactions de face-à-face entre l’agent « institutionnel qui accueille le jeune en difficulté, « puisqu’un enjeu majeur de ces rencontres est précisément la négociation d’un compromis sur la définition de la situation de» usager. Reste à savoir comment on passe des paroles dites à une typologie de logiques de négociation des identités de public ou usager ou client.
Le fait de se raconter ou de rapporter des informations pertinentes mobilise trois registres.
Le premier registre concerne l’actualisation de l’image de soi. « Construire et transmettre des significations – et donc pouvoir mettre tel ou tel champ de pratiques en récit – n’est ce pas nécessairement articuler les séquences temporelles de son existence, le long d’un axe syntagmatique, avec les termes clés d’une argumentation qui oblige à choisir telle ou telle catégorie, faisant intervenir un autre niveau, paradigmatique, de la langue ? Cette « double articulation du langage » (Benveniste, 1974) est totalement homologue à la double transaction identitaire, l’axe syntagmatique mettant en mots la « transaction biographique » (choix des épisodes à raconter) et la « transaction relationnelle » impliquant l’axe paradigmatique (choix des catégories pour la raconter et, donc, référence à un discours d’autrui ») (Dubar, 1996, p. 43). Il s’agit de prendre conscience que les tranches de vie sont une mine d’or où le sujet est appelé à faire du tri entre ses atouts et ses faiblesses pour être capable de se trans-former.
Le deuxième registre tient de l’autobiographie éducative. Le sujet retrace par un récit toutes les influences hétérostructurantes qui l’ont guidé jusqu’à présent. Sujet communiquant et sujet énonciateur, le récit devient une mise en scène des interactions qui l’instaurent comme acteur et auteur des fluctuations de ses rapports au savoir. La restitution rend au professionnel sa capacité de production des savoirs tout en étant le consommateur de ses mêmes savoirs. « Car l’acteur doit vivre personnellement l’historicité : il doit prendre conscience de sa capacité à produire des modèles et non plus seulement à les consommer. Et c’est finalement l’acception du sujet social qui prend le pas sur celle de l’acteur : car le sujet social est susceptible de la prise de conscience et de la distanciation de ses pratiques, seul le sujet social figure le lieu de la capacité à s’élever au-dessus de la simple revendication et donc le lieu de l’affirmation de la lutte pour les modèles culturels » (Xibears, 1983, pp.35-37). L’autobiographie est nécessairement un temps recomposé. L’histoire est reconstruite pour envisager un projet existentiel. Le tri que l’on opère lorsqu’on choisit de se raconter sert à mettre en exergue nos intérêts, nos questionnements et nos relations sociales. Pour que ce travail d’historicisation devienne véritablement supervision, nous devons admettre à la suite de Pierre Dominicé (1988) que ce travail est tributaire du contexte institutionnel dans lequel il se tient, du temps qui lui est consacré et d’une réelle volonté de transformation due à la structuration du récit dans un cadre formatif et non pas thérapeutique.
Le troisième registre met en œuvre la résurgence de l’éthique du sujet. « Parler de soi – ou écrire sur soi – implique une mise en valeur de la personne, de son vécu, de ses souvenirs, de son histoire, de ses sentiments, ou, bien souvent, une revalorisation, une réactualisation de soi, de sa valeur propre » (Ditisheim, 1984, p. 202). Il en va de même lorsque le professionnel parle de l’usager. Lorsque le sujet se raconte, il fait de sa parole une action. Dans le même temps il passe du statut d’acteur à celui d’auteur. Ce travail s’enracine dans ce que nous appelons transaction inter personnelle, parce que les supervisés sont à la fois des demandeurs, puisqu’ils sont présents et effectivement non-demandeurs puisqu’ils ne sont là ni en leur propre nom, ni pour une cure personnelle, Pourtant en s’inscrivant dans ce travail, ils co-construisent à la fois la demande et l’offre. L’information pertinente est l’agrégation d’un échange qui conduit à construire la demande dans une réciprocité structurante.
Le temps de la supervision est un lieu où chacun vient localiser l’expérience de soi, un lieu qui permette à l’expérience de s’éprouver comme auto subjective, comme réfléchie. Recherche existentielle de sens, (déclinaison d’une phénoménologie), l’intersubjectivité y prend figure de moteur. En parlant de phénoménologie, on ne peut s’empêcher de parler de transfert, de clinique. La supervision aborde et traduit les effets d’après coup. « Dans l’après coup de ce qu’il agit,précise J Rouzel, un professionnel, prend acte de ce qu’il a produit. Cette production formative de surcroît, exige un dispositif singulier. » Instance clinique, ce travail d’élaboration dans l’après-coup vise à tous les niveaux un changement de position du sujet dans son rapport aux autres, à lui-même et au monde La question de la fabrication du sens, la réponse à l’invitation que nous faisait notre maître «François Tosquelles : « et toi qu’est- ce que tu fous-là ? » file tout au long de cette chaîne où la question de la formation n’est qu’un chaînon de la question sociale au sens large. La « rectification subjective », comme dit Lacan, peut alors s’exporter hors la cure analytique qui l’a vu naître. Seul le changement subjectif permet d’impulser un changement collectif.
Le terme de clinique apporte avec lui tout son lot d’ambigüité qui s’applique aussi bien à la supervision qu’à la formation. Le klinè par son étymologie grec est ancien un lit; le klinicos, d’où découle le mot « clinicien » est celui qui est au chevet du malade alité, celui qui est à proximité de lui, proche de lui, en quittant son piédestal où son statut, sa position du supposé tout savoir l’avait placé; la clinique est donc l’art de rencontrer l’autre là où il est. On peut sans complexe assurer qu’il y a dans la formation, dans la supervision une position clinique, à savoir de rencontrer celui qui est en formation, en supervision, là où il se trouve, et là où il souffre de ne pouvoir s’y retrouver. « C’est proprement ce qu’a fait Freud pour inventer la psychanalyse. Si ce mouvement est impulsé chez les professionnels dans les espaces de mise en forme de soi, il se déploiera en direction des usagers de l’action sociale. » J Rouzel
Le passage au langage des solutions en supervision collective inaugure un travail de créativité, c’est ici que l’innovation culturelle (cela renvoie à l’ethnologie) commence à prendre place. Cette innovation opère dans trois types d’ordre qui, créant chez le sujet des dynamiques internes grâce aux frontières de l’organisation éducative ou thérapeutique, met en mouvement le désir et la demande de réaménager ses rapports d’usage.
Le premier concerne l’ordre de l’échange. Nous parlons ici de réseaux d’échange, appartenance à des cercles fussent-ils de qualité, en tout cas cercle d’élaboration de codes, de codification sinon de symbolisation. La double transaction traduit par Dubar (1991) peut se décliner dans une telle configuration. Le sujet se construit en effet par ses appartenances sociales (voire ses coquilles humaines au sens d’Abraham Moles) et par ses identités plus intimes. Prenons la présentation qu’en fait Marie-Pierre Mackiewicz (1998) : « C. Dubar (1992) considère la négociation que les individus confrontés à un dispositif mènent à l’égard des agents décideurs comme double transaction. La première est dite « biographique », elle leur permet « de projeter des avenirs possibles en continuité ou en rupture avec un passé reconstitué (‘’trajectoire ‘’) ». La seconde est dite « relationnelle », « visant à faire reconnaître ou non par les partenaires institutionnels la légitimité de (leurs) prétentions, compte tenu des objectifs et les moyens (‘’politique’’) de l’institution » (p. 93). La supervision est le lieu de la réconciliation avec la parole.
Le second tient de l’ordre de la loi. L’organisation éducative ou soignante doit tenir compte du libre arbitre des acteurs agissants, à condition que celle-ci ait un contenant et que son objet ait été défini pour la satisfaction des besoins intrinsèques. La collectivité développe les capacités individuelles à condition de contribuer à l’émergence de la liberté de l’individu. « Le processus identitaire, ponctué d’allers-retours, infini comme celui de la loi, est ouvert comme sur son interprétation infini…La loi n’est pas la simple « mesure » de la culpabilité ; elle offre un appui qui permet de ne pas s’identifier à elle, de ne pas la porter sur son dos, donc d’être assez libre pour inventer d’autres formes de lien et d’existence ; pour être en devenir. La loi permet de soutenir la cassure identitaire sans se noyer dans la faute ou la conscience malheureuse; éthique de la co-naissance, de la vie qui s’interprète » (Sibony, 1991, p.261-262). Le système d’action concret crée le jeu social du conflit et de la coopération. L’agir stratégique fonctionne alors grâce à la marge de jeu qui est laissée au sujet-acteur. La supervision explore les interstices, les zones d’incertitude où précisément le sujet va s’engouffrer avec ses propres équations.
Le troisième est l’ordre du mythe (fondateur), l’ordre de la culture. Tout ce qui est conféré à la structuration symbolique, crée des normes et forme du sens. L’évocation des mythes, des légendes, les contes, les fables engendrent des processus par lequel l’humanité a fini par se former en forgeant des mécanismes défensifs qui aident à surmonter certaines béances dans lesquelles il est facile de sombrer. Les tabous ou tout autre interdit fondateur structurent le genre humain. Le système de solidarité et de satisfaction passe par le système de représentations et de symbolisation qui offre des explications à travers les mythes, les rites, les supports religieux, éthiques, idéologiques politiques et économiques. L’identité individuelle s’y réfère, s’y structure ou s’y disloque. La supervision est cet espace où le multilinguisme peut prendre pied.
Du coup la transaction interpersonnelle vécue en supervision, crée les conditions d’une invention de règles communes. Lorsqu’il existe un climat de bienveillance, les membres du groupe soutiennent le participant en difficulté, et lui manifestent de la solidarité. Ainsi tentant de relativiser ses difficultés («c’est normal, ça m’est arrivé moi aussi, etc.»), ils repèrent des exceptions, indiquent des contrastes, trouvent des aspects qui marchent dans la relation décrite comme uniquement difficile, donc proposent des « solutions ».
En supervision, les solutions constituent tous les changements perçus à partir d’une description détaillée des situations sur le terrain, mais aussi et surtout ceux qui se déroulent dans « l’ici et maintenant » des interactions au sein du groupe. L’objectif de la supervision vise la transformation par les professionnels de celles-ci, en information pertinente et utile pour leurs relations avec les usagers et entre les membres d’une équipe. Les solutions sont ainsi présentes dans les difficultés évoquées. Elles sont donc tout ce qui permet aux participants de reconnaître et de décrire des différences ceci à différents niveaux : d’une part dans leur relation avec les usagers, d’autre part dans leurs interactions en séance, ainsi que d’une supervision à l’autre.
La supervision est un espace de médiation : « Si la question de la médiation revient avec insistance dans le débat contemporain, c’est probablement parce qu’elle exprime la nécessité dans laquelle nous sommes pris de traiter d’une manière nouvelle, aussi bien dans l’ordre de la vie psychique que dans celui de la culture, la question récurrente de l’origine, des limites, de l’immédiat, des transformations et, surtout, de la violence, dans sa double valence destructrice et créatrice. »
Tout professionnel dispose de compétences. Il est d’ailleurs reconnu socialement pour cela à la différence des patients ou de leur famille venant en consultation. Si dans une situation donnée ramenée en supervision, il se perçoit en difficulté, c’est qu’il pense ne pas pouvoir utiliser ses compétences, voire en être dépourvu, parce que pris dans une vision unique où il ne s’y retrouve pas.
Vignette clinique
L’équipe éducative d’un IME m’annonce que la situation abordée lors de la séance précédente semble évoluer dans le bon sens !
Qu’est ce qui a évolué ?
Nous réalisons un nouveau génogramme. Celui de la dernière fois ne comportait ni les grands parents ni les arrières grands parents. La mère exprime qu’il s’agit dans la relation qu’elle entretient avec sa fille d’une réactivation de sa propre vie. Sa propre mère ne se serait pas occupée d’elle. Rappelons qu’à la dernière séance un membre du groupe évoquait l’infantilisation de cette adolescente en indiquant que celle-ci est habillée comme une poupée Barby, avec des vêtements mal dimensionnés, trop petit pour son esthétisme, très juste au corps pour paraître comme une lolita. Cette préadolescente qui a une surcharge pondérale, est toujours « collée » à sa mère. Toute approche des éducateurs portant sur l’autonomie se heurte toujours à un mode de coopération pathogène. Lorsque l’équipe éducative suggère un régime alimentaire, les parents opposent une telle résistance qu’un conflit commence à germer à l’égard l’institut. Peu à peu, apparaît un enjeu majeur : il s’agit davantage d’un face à face famille/institution que d’une coopération sur des sujets éducatifs pour aborder les besoins spécifiques. Ce constat met alors en lumière que la confrontation de l’institution avec la famille est de l’ordre des transactions aux frontières des institutions. La famille vient déposer à cet endroit le sentiment de disqualification de sa parentalité du fait de l’intrusion d’un tiers dans les prérogatives parentales, à charge pour l’institution d’optimiser la juste place de celle-ci.
Lors de la séance précédente, certains ont parlé de provoquer des situations valorisantes pour la famille, d’associer les parents à des actions spécifiques : visiter des musées car la mère est passionnée d’arts, faire du shopping, prendre soin du corps dans un atelier d’esthétique. D’autres insistent sur des ateliers d’échange sur des thèmes choisis avec les parents. D’autres encore parlent de journées portes ouvertes où l’animation serait confiée aux familles soutenues par l’équipe éducatives. Au fur et à mesure que les participants citent des espaces de pratiques, on voit apparaître des domaines de compétences exercés par les et les autres. Et pourtant, lorsque je leur demande ce qui a pu évoluer, nous assistons à une sorte d’externalisation des compétences, un véritable travail de reliance a pu se mettre à l’œuvre. L’invention de ce concept de reliance est attribuée à Marcel De Bolle de Bal. Mais lui-même présente Roger Clausse et Maurice Lambilliotte comme les pères philologiques de cette notion.
Roger Clausse a inventé cette notion, selon M. Bolle de Bal, dans son livre . Il y définit la reliance comme une « rupture de l’isolement ; recherche de liens fonctionnels, substitut des liens primaires, communion humaine ». Ainsi, la rupture permet à l’individu d’être en interaction avec d’autres individus, avec son environnement, avec les Idées (le terme idée est à prendre au sens philosophique). Pour Maurice Lambilliote, la reliance est un état et un acte, « l’état de se sentir relié », « un acte de vie (…) acte de transcendance par rapport aux niveaux habituels où se situe notre prise de conscience ». Pour cet auteur, notre esprit peut dépasser tout isolement, la reliance permet lui de s’élever à des dimensions supérieures.
M. Bolle de Bal s’est inspiré de ces deux auteurs pour enrichir et réinventer le concept de reliance. Pour lui, « la reliance possède une double signification conceptuelle ». D’une part, elle est « l’acte de relier ou de se relier : la reliance agie, réalisée, c’est-à-dire l’acte de reliance », et d’autre part, elle est « le résultat de cet acte : la reliance vécue, c’est-à-dire l’état de reliance ». La reliance, c’est donc créer ou récréer du lien, mais c’est également ce lien lui-même. Il y a toujours au moins un individu à l’un des bouts de ce lien, la reliance ne s’applique à deux choses, ou deux idées. C’est l’individu en lien avec un autre élément, concret ou abstrait.La reliance est cette étonnante pulsion qui pousse à se chercher, à s’assembler, à se rendre à l’autre (Maffesoli, 1992). Elle est cette aspiration à reconnaître l’autre dans sa différence et sa personnalité, avec ses désirs, ses peurs, ses intérêts, aspiration à se rencontrer, à échanger avec lui, à être reconnu par lui, à vaincre l’angoisse de la séparation et à affronter celle de la rencontre (Bolle de Bal, 1986). » Dans cette définition, l’auteur apporte une autre dimension à la reliance : le fait de recevoir et d’accepter l’individualité de l’autre. Dans toutes les définitions proposées, la reliance se fait très souvent dans une relation duelle, c’est-à-dire avec à chaque fois deux parties. «
En supervision on retrouve donc cette dualité propre à la reliance : entre un participant qui s’expose en groupe, entre le superviseur et les supervisés. La supervision d’équipe, bien que ce ne soit pas son objet premier, est aussi un lieu qui permet aux participants de partager des informations sur les « faits », pas uniquement sur les perceptions subjectives.
2. Le travail sur la demande : ce qu’il en est de l’appropriation de la commande institutionnelle par les participants
À l’issu d’une expérience de 20 équipes, je peux dire que la supervision est ponctuée par 3 temps forts et met en mouvement plusieurs espace d’élaboration: C’est ce que j’appelle les temporalités de la supervision.
La première temporalité concerne l’émergence même de l’idée de solliciter un intervenant extérieur. Quel est le point d’origine ? A l’origine il y a toujours une problématique de déliaison. On se dit que le temps passant, il faut voir si les fondamentaux du projet restent pertinents. S’en est-on éloigné ou pas ? La déliaison opère dans le non-dit, et vise souvent la professionnalité d’un collègue, d’un secteur d’activité, d’un groupe de professionnel, etc. Les griefs vont suivre: «ta relation avec tel usager pose question», «lorsque tu évites de faire ceci…, tu n’es pas professionnel !». Ces attaques sont meurtrières dans la mesure elles s’érigent en jugement arbitraire distribuant, on ne sait par quelle légitimité, qualifications et disqualifications. Le professionnel visé par ces attaques est ainsi confrontés aux processus de coping qui, nolens voles, produisent des crises dont la violence met l’institution en situation de ne pouvoir se saisir et de transformer ce conflit en un objet de travail. « Les attaques disqualifiantes de la professionnalité tendent à disjoindre, à délier. Elles portent précisément sur les intrications entre identification professionnelle et identité du sujet, ainsi que sur les étayages entre le sujet et le groupe d’appartenance. Ces attaques rabattent alors toutes dynamiques intersubjectives sur des dynamiques intrasubjectives ; elles tendent à isoler le professionnel et à le déloger de cette place de professionnel à partir de ce qui est alors épinglé comme ses « incompétences relationnelles ».
L’institution s’invite ou est invitée à penser ses fondamentaux pour un travail de reliance.
Vignette clinique
Un centre de postcure est en supervision depuis quelques années. Les séances sont consacrées à l’analyse des pratiques où la prise en charge des « usagers » est abordée. Le chef de service qui me sollicite, pense que ce cadre ne peut pas être confondu avec la question de la dynamique interinstitutionnelle. Il s’agit pour lui d’instaurer un lieu où les failles professionnelles et identitaires vont être abordées. Il s’agit en effet d’aider à reconfigurer les modalités d’approches professionnelles, d’interroger l’imprégnation implicationnelle de chaque professionnelle.
Lors de la première rencontre avec l’équipe, je viens me présenter et je demande par un tour de table que chacun exprime ses attentes. Après leur avoir présenté les quatre caractéristiques du projet initiées par Boutinet, chacun semble adhérer à cette proposition
La première séance est symbolique. Elle est localisée hors des lieux de la pratique. Dès le départ, comme si l’équipe n’attendait que ça, la parole semble se libérer. Le sujet évoqué porte sur la réalisation des tâches subalternes qui ne seraient pas effectuées par un membre de l’équipe qui revient d’un arrêt maladie. Ce comportement dérange la quasi-totalité de l’équipe. Le malaise est de prime abord attribué au phénomène de répétition. Et puis progressivement, il apparaît que certains ont hésité à l’interpeler pour cause d’empathie à son égard, d’autres tout en étant solidaire, interrogent les conditions de retour du collègue. La problématique de l’usure va peu à peu prendre corps.
Cette première temporalité concerne le contexte institutionnel et porte sur l’instauration d’une position de réflexivité collective. L’institution se trouve dans un impensé qui risque de produire une déliaison. Lorsque les responsables de l’institution sollicitent un intervenant extérieur, c’est pour renouer avec le sens et les quatre propriétés du projet évoquées par J. P. Boutinet.
Le fait que ce travail soit initié par l’institution lui confère la nécessité de définir un cadre. C’est l’institution qui est instituant. Cependant, si la présence aux séances, les horaires et le lieu du déroulement s’organisent avant le démarrage à proprement parler de la supervision, il reste que les règles de fonctionnement interne aux séances incombent à la vie du groupe constitué. Ce n’est pas pour autant un espace décisionnel tout en étant centré sur la manière dont chacun vit sa pratique professionnelle..
L’adhésion de chacun doit à favoriser l’affiliation aux règles de fonctionnement énoncées lors de la rencontre initiale avec le groupe.
Cela suppose l’engagement à : la confidentialité, la bienveillance, l’assiduité.
La seconde temporalité est construite par les participants au groupe de supervision. Chaque groupe imprime à la supervision ses propres dimensions. Le premier travail portera sur les attentes individuelles. Si elles ne sont pas prise en compte, il sera ensuite très difficile de parler d’affiliation au groupe et de dynamique. Il s’agit d’aborder en commun la question de l’appropriation de la commande institutionnelle. Nous avons deux manières de procéder :
Une fois le cadre du déroulement des séances énoncé, je demande aux participants d’expliciter leurs attentes en décrivant ce que chacun entend par supervision (approche sémantique sinon sémiologie du concept, approche clinique sinon sémiologie de l’acte) et ce qu’il attend de la supervision. Il y a en général, ceux qui viennent sans conviction, pour voir, parfois un peu sceptique. D’autres sont dans une démarche de réflexion. D’autres encore viennent là pour réellement se saisir de ce lieu pour prendre du recul.
Je propose ensuite la réalisation d’un blason « Le blason symbolise le mouvement même par le lequel chaque être advient à lui-même, la boucle étrange qui permet de se connaître, en faisant des couplages structurels le lieu d’une naissance personnelle. » (Galvani, 1997, p. 145). Le blason parce qu’il évoque le souvenir, devient le lieu de construction d’une mémoire des compétences enfouies. Et ses compétences s’épanouissent grâce à la contingence des choix qui s’offrent à la personne lorsqu’il a la possibilité d’explorer toutes les dimensions de ses potentialités. « …l’acte de se souvenir s’effectue (…) de manière mimétique. En se souvenant, on crée un rapport mimétique au matériel du souvenir qui ensuite sera exposé différemment selon la situation. Pour Peretti, le blason permet « un travail par support métaphorique sur l’image de soi » (1986). Cet outil qui « a une dimension projective », propose à un individu ou à des sous-groupes de remplir des cases d’un écusson avec des dessins figuratifs ou non, ou des propositions en vue de signifier des éléments importants d’une représentation de soi ou d’une appartenance collective » (De Peretti, 1986). Le blason répond à 6 objectifs énoncés du plus personnel au plus collectif
1° « Inviter chaque personne à un effort de réflexion valorisante sur elle-même, avec le symbolisme de fierté inhérent au blason.
2° Exercer en chacun sa congruence, sa relation à lui-même et sa transparence aux autres ou son désir d’être.
3° Rendre plus profond la représentation d’un individu à autrui.
4° Accroître l’authenticité des perceptions réciproques des individus dans un sous-groupe.
5° Aider les individus d’un sous-groupe à prendre conscience collectivement de leur structure culturelle sous-jacente (selon leur personnalité de base).
6° Rendre possible une communication interculturelle entre des sous-groupes de pays ou d’ethnies différents, par la représentation et la compréhension des blasons respectifs et des projections sous-jacentes » (De Peretti, 1986).
D’après P. Galvani, le blason « est un lieu de prise de conscience et un moyen d’actualisation de l’autoformation » (1999, p. 3). Il répond « à un double objectif de recueil de données et d’échange co-formatif » (p.83).
Le blason se situe donc dans cette mouvance bio-cognitive initiée par Gaston Pineau.
On peut dire que le blason est un outil qui permet à l’individu de revenir sur son intériorité tout en mettant des garde-fous sur les face à face que nous sommes conduits à établir. Le blason est de l’ordre de la transaction. Le blason est indicateur de transaction pour mettre en exergue les représentations que le sujet se fait de lui en vu de se sortir des processus attributionnels dans lesquels il peut être prisonnier…
Le blason est aussi de l’ordre de l’affectivité dans la mesure où lorsque l’on dit qu’il n’y a pas de réelle distance entre moi et mes sentiments, on pose que mes assertions sont le reflet de mon intériorité. Celle-ci contribuera à donner de moi une image de quelqu’un de digne de confiance. Le blason reflète la façon d’éprouver le monde, de le vivre, de se le représenter. L’instauration du langage trouve dans le blason son étayage herméneutique. Il se charge de sens.
Nous avons estimé que la supervision participait du travail d’assertivité.
Vient le moment où le groupe détermine les modalités d’exploration des blasons. Je propose que chaque membre se prononce non pas en son nom propre, dans sa sphère privée, mais surtout en tant que professionnel, dans la sphère public comme sujet social Ce que je privilégie c’est la prise de conscience par chacun de la fonction exercée dans la situation qui s’expose. L’information pertinente recherchée portera essentiellement sur la part de détermination de chacun dans une dynamique groupale. Nous sommes ici dans un travail d’observation participante. Le travail d’équipe est alors interrogé à l’aune des fondamentaux du projet.
Dans cette seconde temporalité, il s’agit de déterminer le métier qu’on fait collectivement.
Cette identité professionnelle recouvre une pluralité car nous sommes nourri par nos rencontres de public en difficulté, en créant de toute pièce une unité socio éducative dans le service de neuro psychiatrie l’hôpital général de Brazzaville, dans plusieurs instituts médico éducatif en qualité d’éducateur spécialisé, dans un institut thérapeutique, éducatif et pédagogique, dans un centre médico psycho pédagogique proposant des médiations diverses et exerçant la fonction de Responsable Pédagogique, par nos formations universitaires d’abord à l’institut des Sciences de l’éducation de Brazzaville au Congo pour un cursus en psychologie, arrivé en France pour le Diplôme d’état d’éducateur spécialisé, nous avons ensuite validé un master en psychologie, un master en ingénierie et stratégie de la formation. Ce parcours est couronné par une thèse de doctorat sur la psychologie de l’éducation portant sur les Médiations Éducatives.
C. Montandon, Approches systémiques des dispositifs pédagogiques, Enjeux et méthodes, L’Harmattan, Paris, 2002, p. 100.
Alexandre Victor, L’individu dans la pensée d’Abraham Moles, Actes du Colloque « Communication, Espace et Société », Conseil de l’Europe, Avril 1994, éd. Association Internationale de Micro psychologie, <atelier@archivue.net
2 Kaës René, Médiation, analyse transitionnelle et formations intermédiaires in Bernard Chouvier et al., Les processus psychiques de la médiation, Dunod, 2002, p. 15
« La philologie est la science qui traite d’une langue d’un point de vue historique, à partir de documents écrits. », définition trouvée sur le site Internet wikipédia.
<Reliance, déliance,liance :émergence de trois concepts sociologiques<, Maurice Bolle de Bal, Sociétés n° 80 – 2003/2, p.100
, Roger CLAUSSE, Bruxelles, Éditions de l’Institut de Sociologie, 1963.
Id, p.9
<L’homme relié. L’aventure de la conscience, Maurice LAMBILLIOTTE, Bruxelles,
Société Générale d’Édition, 1968, p.108 et 109.
<Reliance, déliance, liance : émergence de trois concepts sociologiques<, Maurice Bolle de Bal, Sociétés n° 80 – 2003/2, p103
L’accompagnement dans tous ses états, Éducation Permanente, n°153, pp.57-68, p.63Georges Gaillard, La généalogie institutionnelle et les écueils du travail d’historisation : entre filicide et parricide. Pour un développement de cette perspective, cf. Georges Gaillard (2001), « Identifications professionnelles, assignations institutionnelles et paralysies de la pensée », dans Revue de psychothérapie psychanalytique de groupe, n° 35, Toulouse, Érès, p. 185-200 ; et pour un point de vue plus large du nouage entre professionnels du social, usagers et demande sociale : Paul Laurent Assoun (1999), Le Préjudice et l’Idéal, pour une clinique sociale du trauma, Paris, Anthropos